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LES TÉLÉPHAGES ANONYMES

Il était une fois Lurdo & Sygbab, deux internautes passionnés de séries tv et de cinéma, et qui cherchaient un endroit où archiver leurs avis (semi) éclairés...

Un film, un jour (ou presque) #436 : Passengers (2016)

Publié le 25 Janvier 2017 par Lurdo in Critiques éclair, Cinéma, Drame, Science-Fiction, Romance, Review

Au programme : un film par jour, cinq jours par semaine, et des critiques d'une vingtaine de lignes, tout au plus.

Passengers :

Passager d'un vaisseau spatial dormant embarqué dans un voyage de plus d'un siècle, Jim (Chris Pratt), un technicien voyageant en classe économique, est arraché à son hibernation lorsque le vaisseau traverse un champ de météorites qui endommage ses équipements. Seul à bord de ce navire luxueux, à 90 ans de sa destination, il tente alors de s'occuper, puis il rencontre Aurora (Jennifer Lawrence), elle aussi passagère, et le couple se rapproche, alors même que les pannes techniques se multiplient autour d'eux...

Attention, SPOILERS : ce résumé officiel (ainsi que la bande-annonce du film) est totalement mensonger.

Car Passengers est un film étrange et très frustrant, vendu comme une romance dans l'espace entre deux acteurs charismatiques et attachants, mais qui en fait, s'avère plutôt une sorte de 10, Cloverfield Lane qui ne s'assumerait pas, avec un homme séduisant et athlétique en lieu et place de John Goodman.

Je caricature un peu, bien entendu, mais contrairement à la comédie romantique spatiale sur fond de catastrophe (Titanic in Space, en somme) décrite dans le résumé et les bandes-annonces, on est plus ici, dans un "Syndrome de Stockholm - le film", avec ce mécanicien lambda qui, au bout d'un an de solitude, et plutôt que de se suicider ou d'envisager de passer 89 autres années seul, commence à fantasmer sur une autre passagère endormie ("Aurora", comme dans La Belle au Bois Dormant, quelle subtilité), qu'il finit par réveiller/condamner à une vie solitaire en sa compagnie, puis qu'il séduit après lui avoir caché la vérité, et expliqué qu'ils n'avaient pas d'autre choix que de rester seuls... assez glauque, en fin de compte, et je comprends que le département promotionnel du studio ait tout fait pour cacher ce malaise, et pour vendre un film plus glamour et spectaculaire.

D'ailleurs, je me suis constamment demandé à quel point cet aspect du script avait été étouffé par la production au fil du tournage, à mesure que le projet prenait de l'ampleur, que Jennifer Lawrence était choisie pour le rôle féminin, etc.

Car ponctuellement, le script semble vouloir aborder frontalement ces questions de morale ambiguë, ainsi que des notions comme les différences de classe, etc... mais systématiquement, elles sont désamorcées par des explications superficielles (pourquoi telle ou telle chose ? Parce que telle ou telle pseudo-raison totalement arbitraire), ou par des rebondissements qui font office de distraction.

C'est bien simple, lorsque Jim avoue à Aurora que depuis un an, il lui ment, et qu'il est responsable de ce qui lui est arrivé, le film ne passe pas plus de cinq minutes sur les conséquences de ce mensonge : elle s'indigne, elle le frappe, elle boude, il lui fait des "excuses" tout en la surveillant via le système de vidéo de bord (glauque, bis), il tente de la reconquérir, et... Laurence Fishburne débarque, pour la dernière demi-heure de film, dans laquelle le récit devient un survival à effets spéciaux qui ne revient plus vraiment jamais sur les actes de Jim, et au terme duquel les deux amants sont réconciliés.

Distraction !

(d'ailleurs, la réaction de Fishburne aux aveux de Jim est tellement peu marquée qu'elle en devient risible)

On se retrouve donc avec un script qui ne semble jamais vraiment certain de vouloir assumer ses choix narratifs, et qui, par conséquent, donne un peu l'impression d'avoir des personnalités multiples. D'un côté, l'homme seul face à l'espace et à une mort certaine ; ensuite, une romance futuriste ; à côté, un survival de science-fiction, bourré de jargon technique sans intérêt ; sans oublier ce côté un peu malsain du personnage de Pratt... En n'assumant pas pleinement chacun de ces aspects, et en tentant de tous les combiner, le film finit par sembler bancal, victime de grosses ficelles narratives censées faire passer des transitions et des rebondissements un peu trop gros.

N'importe quel spectateur, en voyant le film, se posera certainement des questions à certains sujets (pourquoi ne réveiller personne d'autre - des ingénieurs ou techniciens civils - pour aider à ouvrir la porte du cockpit, alors même que le navire part en morceaux autour d'eux ? Pourquoi n'y a-t-il qu'un lit médical pour plusieurs milliers de passagers ? Pourquoi n'y a-t-il aucun caisson d'hibernation de rechange ? Pourquoi n'y a-t-il aucun système automatisé qui réveillerait l'équipage en cas de problème technique ?, etc, etc, etc), et envisagera probablement de nombreuses manières d'améliorer le script, en le faisant basculer plus franchement dans une direction ou une autre : thriller (ouvrir le film sur le réveil d'Aurora, garder son point de vue pendant tout le récit, et révéler que Jim a totalement perdu la tête, l'a réveillée après plusieurs années... et qu'elle n'est pas la première à lui avoir servi de Belle au Bois Dormant), romance (laisser Aurora se réveiller suite à un vrai dysfonctionnement technique, ce qui placerait les deux protagonistes sur un pied d'égalité), film d'aventures (comment une journaliste et un mécanicien vont-ils réussir à sauver tous les passagers endormis de ce navire avant une collision fatale ?), etc...

Et je ne parle même pas de la happy end prévisible du film, une fin rendue possible par de grosses ficelles scénaristiques qui placent Jim dans la position du héros qui se sacrifie, et qui justifie à posteriori son geste en montrant que s'il n'avait pas réveillé Aurora, le duo n'aurait pas pu sauver le vaisseau, whouhou, c'est beau l'amour, le destin, etc... *facepalm* 

2.5/6 (parce que c'est bien produit, réalisé, interprété, que les effets spéciaux sont réussis, et tout et tout... ça aurait même pu être 3/6 si le score de Thomas Newman n'était pas aussi insipide et dérivatif)

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