La franchise The Witcher de Netflix est actuellement dans une situation problématique : les deux saisons de la série-mère n'ont pas convaincu, Henry Cavill a annoncé son départ au terme de la saison 3, et les coulisses de la franchise semblent parasitées par des conflits d'égo, révélés par un ancien scénariste (celui du spin-off animé et du meilleur épisode de la saison 2) regrettant le fait qu'une bonne partie de l'équipe créative de la série n'avait aucune connaissance des ouvrages originaux ou des jeux, s'en moquait ouvertement, et était uniquement là pour remplir son CV... ce qui n'est pas forcément surprenant lorsque l'on sait comment fonctionne Netflix.
Et puis il y a ce spin-off, une préquelle en quatre épisodes (initialement six épisodes, avec une actrice principale différente) à la genèse compliquée, confiée à un scénariste d'Iron Fist et de The Witcher, et qui a été très mal reçue par la presse et le public à sa sortie, en décembre dernier. Reste à voir si cette mauvaise réputation se confirme au terme du visionnage de ces (quatre heures de métrage... ???)
The Witcher - L'héritage du sang (The Witcher : Blood Origin - 2022) :
Pour contrer la menace croissance du mage Balor (Lenny Henry), qui tente de maîtriser la magie du chaos pour ouvrir des portails et conquérir d'autres mondes, un groupe d'elfes s'unit bon gré mal gré et tente de sauver son monde : Fjal (Laurence O'Fuarain), un guerrier tombé en disgrâce ; Éile (Sophia Brown), ancienne assassin devenue barde itinérante ; Scian (Michelle Yeoh), sa maîtresse d'armes ; Syndril (Zach Wyatt), le mage ayant découvert les portails magiques vers d'autres mondes ; Zacaré (Lizzie Annis), son âme-sœur à la jambe handicapée ; Callan (Huw Novelli), un mercenaire ; et Meldof (Francesca Mills), une naine éprise de vengeance contre les elfes...
Et effectivement, au visionnage de cette seule et unique saison, on comprend vite 1) que la production a été problématique, et 2) pourquoi le tout a été assez mal reçu.
Dès les premiers instants, avec cette introduction bancale qui voit une métamorphe (Minnie Driver) raconter à un Jasquier un peu bouffi les événements de cette mini-série (une narration qui se poursuit en voix off pendant toute la saison, et ce de manière très maladroite), on devine qu'il s'agit là d'une énorme rustine de post-production, servant à cacher des coupes franches dans ce récit très "les Sept mercenaires".
Et tout au long de la saison, il en va de même : les personnages (à la diversité très Netflix, y compris une sourde-muette utilisant la langue des signes américaine) sont sous-développés, ils se rencontrent de manière totalement artificielle, "par pure coïncidence", leurs relations évoluent par à coup, jamais organiques, le worldbuilding est encore plus catapulté et sommaire que dans la série-mère, bref, l'écriture est sérieusement insuffisante, bourrée de clichés, et pas aidée par le remontage sommaire en post-production.
En prime, le tout réécrit un peu les origines des Witchers (à l'origine, un moyen désespéré pour les humains d'avoir une chance de se battre contre des créatures magiques dans un nouveau monde inconnu et hostile, ici, un bref rituel elfe conçu pour permettre aux sept mercenaires de tuer un unique monstre amené par un sorcier ambitieux), invente un toutéliage bancal avec Ciri, force une histoire d'amour très plate, et enrobe le tout de chansons folk assez médiocres (ainsi que d'une bande originale de Bear McCreary qui lorgne très fortement sur son Black Sails).
Et puis il y a de toute façon un problème de base, récurrent à cette incarnation du Witcher : la société elfe n'a aucune personnalité. Les elfes sont tout simplement (visuellement et dans leur écriture) des humains avec des oreilles pointues, insipides et génériques, et leur société ressemble à du sous-Game of Thrones, une impression encore renforcée par les jeux de pouvoir sur lesquels les scénaristes se concentrent ici, avec cette jeune Impératrice trop ambitieuse. C'est générique et quelconque, et ça, c'est un souci qui remonte aux deux premières saisons de la série-mère.
Au final, cette mini-série tombe effectivement à plat : effets spéciaux plus fauchés, écriture bancale, personnages peu mémorables (exception faite de la naine, très sympathique et attachante, et dont l'interprète méritait mieux), et rustines permanentes pour dissimuler la production chaotique (post-synchro évidente sur des plans larges, coupes maladroites, montage bancal), on se retrouve avec une mini-série à oublier rapidement, et qui n'apporte clairement rien de positif à l'univers du Witcher de Netflix.
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