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LES TÉLÉPHAGES ANONYMES

Il était une fois Lurdo & Sygbab, deux internautes passionnés de séries tv et de cinéma, et qui cherchaient un endroit où archiver leurs avis (semi) éclairés...

Un film, un jour (ou presque) #1175 : Joker (2019)

Publié le 1 Avril 2020 par Lurdo in Cinéma, Comédie, Critiques éclair, DC, Drame, Review, Thriller, USA

Au programme : un film par jour, cinq jours par semaine, et des critiques d'une vingtaine de lignes, tout au plus.

Joker (2020) :

Arthur Fleck (Joaquin Phoenix), comique de stand-up raté vivant avec sa mère (Frances Conroy) dans un appartement miteux de Gotham, souffre de nombreux problèmes psychologiques, et notamment d'une tendance à éclater spontanément de rire aux pires moments possibles. Jusqu'au jour où il ne supporte plus d'être une victime perpétuelle, et trouve dans la violence et le crime un moyen de s'extraire de sa condition...

On ne présente plus ce Joker, carton au box-office qui a fait le buzz pour de bonnes et de mauvaises raisons, à sa sortie. film d'un Todd Phillips controversé, fanboy absolu de Martin Scorsese (comme le prouvait son film précédent, War Dogs, qu'un critique américain avait résumé par "Scorsese for bros"), qui voulait à tout prix rendre hommage à son modèle en mettant en chantier un remake de La Valse des Pantins... sans parvenir à intéresser la Warner, trop préoccupée par l'idée de retrouver le succès avec ses films de super-héros, alors en déroute.

Un Todd Phillips roublard, qui n'a jamais caché son mépris pour les films dits "de comic-book" et qui, en accord avec sa star et son producteur (Scorsese lui-même) a alors décidé de feinter, et de faire son remake en lui apposant le titre Joker (et en l'entourant vaguement d'un décorum Batman/Gotham City) : de quoi satisfaire le studio, ravi de redorer là son blason avec un projet économique et artistique, et le réalisateur lui-même, content d'être pseudo-subversif et de faire un "vrai film" dissimulé derrière des apparences de métrage pop-corn creux.

Autant dire que je n'étais pas pressé à l'idée de regarder ce "cheval de Troie" cinématographie, ce métrage tellement hypé par une certaine frange du public et des critiques que cela en venait à être contre-productif et repoussant... et finalement, cette mauvaise blague passe plus ou moins bien.

Alors ça reste clairement une pâle imitation du style de Scorsese, de ce New-York Gotham 70-80s crasseux, poisseux et corrompu au parcours de Fleck, modelé sur celui de Rupert Pupkin et de Travis Bickle, en passant par la présence de De Niro dans un rôle photocopié sur celui de Jerry Lewis dans La Valse.... Ça reste aussi clairement un film aux prétentions artistiques et poseuses, comme en témoignent de nombreux plans à la symbolique lourde, ou uniquement là pour permettre à Phoenix de faire son numéro d'acteur dansant.

Et effectivement aussi, le toutéliage à l'univers DC semble souvent amené à la truelle, entre la sous-intrigue de la paternité de Wayne Sr, et une énième reconstitution de la mort des parents Wayne, ici indirectement liée au chaos généré par le Joker.

Mais dans l'ensemble, aidé par l'interprétation habitée de Phoenix, le film tient plutôt la route en tant qu'épisode Elseworlds, ces version alternatives des personnages DC Comics, détachées de toute continuité et uniquement là pour permettre aux scénaristes de se lâcher et de réinventer les icônes de la marque.

C'est exactement ce que Phillips a fait ici : réinventer le Joker en en faisant un protagoniste sombre et poisseux d'un film de Scorsese ultra-sérieux, au narrateur peu fiable, le tout sur une musique grinçante assez souvent agaçante.

Est-ce que c'est pour autant un film d'exception méritant tous ces louanges ? Non, franchement pas.

Est-ce que le trait est un peu trop forcé dans le pathétisme et le misérabilisme ? Probablement, oui, avec un Phoenix qui, ponctuellement, tourne un peu à vide en cherchant à rendre son Fleck toujours plus barge.

Est-ce que le tout ressemble un peu trop souvent à du cosplay de Scorsese, une copie studieuse et un peu pataude d'un élève se prosternant aux pieds de son maître ? Tout à fait.

Est-ce que le propos du film sur l'insurrection populaire, la rébellion, les élites pourries et méprisantes, érige (volontairement ou non) le Joker en figure révolutionnaire et anarchique, un modèle à suivre par des hordes de spectateurs ne disposant pas forcément des clés permettant d'analyser le film ? On peut se poser la question et se demander si Phillips, qui aime s'imaginer en pseudo-rebelle d'Hollywood, a bien mesuré l'ampleur de ce qu'il faisait là (ou s'il est resté à la surface de son script).

Mais honnêtement, je m'attendais à pire. Joker reste une relecture intéressante de ce personnage, relecture à la fois ancrée dans son époque, et perpétuellement en recherche de nostalgie. Une relecture un peu hypocrite (puisque tout est du point de vue d'un homme fou et malade, on pourrait éventuellement résumer le tout comme un gros "ce n'était qu'un rêve" rendant la moindre tentative d'analyse du film vaine et inutile) et cynique, pleine de défauts et manquant de subtilité, mais qui aurait pu s'avérer bien pire.

3.5/6

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Et comme toujours, vous pouvez retrouver la liste complète de tous les films passés en revue sur ce blog dans le menu Index de haut de page, ou en cliquant directement sur ce lien (000-1000) et sur celui-ci (1001-2000)...

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