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Farscape, saison 4 :
Après une fin de saison 3 qui voyait Moya absorbée par un vortex, abandonnant Crichton et son module seuls dans l'espace, le temps de la reconstruction est arrivé. Pas seulement pour les personnages, mais également pour les scénaristes, qui repartent sur de nouvelles bases en réunissant petit à petit les membres de l'équipage non sans quelques surprises.
Stark n'est plus là, Jool est débarquée peu de temps après le début de saison ; Moya se repeuple donc avec deux nouveaux arrivants (sans compter Noranti qui est présente depuis le 3.22) : Sikozu, et Scorpius.
La première, dotée d'une grande intelligence et d'une connaissance étendue des Leviathans - mais uniquement théorique -, ne réussit pas à s'intégrer à cause d'opinions bien tranchées et d'un entêtement sans limite. Et comme elle considère Pilot inexpérimenté et son équipage trop naïf, cela n'aide pas sa cause.
Mais elle peut compter sur le soutien de Scorpius (leur duo est vraiment excellent), dont la présence à bord est une très bonne idée : cela crée une nouvelle dynamique et ses confrontations régulières avec John sont un pur régal puisqu'on doute constamment de sa sincérité.
Ces bouleversements entraînent une première partie de saison parfois laborieuse, le temps de s'adapter à de nouvelles interactions. Quelques épisodes retombent dans les travers des deux premières saisons en jouant un peu trop sur l'aspect "créatures bizarroïdes" et sur l'humour pipi-caca, qui ont certes toujours été présents mais qui ne sont drôles qu'à petites doses.
Mais il y a des perles, dont John Quixote - écrit par Ben Browder lui-même - fait partie : le concept de jeu vidéo grandeur nature couplé à une multitude de références (Max Headroom ou Monty Python and the Holy Grail pour ne citer qu'elles) réserve de bons moments.
La seconde partie de la saison remet en revanche la série sur les rails de l'excellence atteinte la saison précédente, à commencer par Unrealized Reality. Un épisode atypique, puisque l'action fait ici place à des explications de texte sur les vortex, qui offrent des possibilités infinies puisqu'ils permettent de naviguer à la fois dans l'espace et dans le temps. Une entrée ne correspond pas à une sortie unique : il en existe un nombre incalculables.
Mais comme l'indique Einstein (une entité appartenant à une race dont les Anciens sont issus, sachant que ces derniers ont été génétiquement modifiés afin de pouvoir vivre dans l'environnement d'autres espèces), le problème n'est pas d'aller d'un point A à un point B, mais de revenir au point A après l'avoir quitté chronologiquement parlant.
Si un voyageur imprudent le rejoint avant, il crée alors une réalité non réalisée, et les multiples voyages d'un John ignorant en la matière en ont engendré une pléthore. Mais si les événements de cette réalité sont assez proches de ceux qui se sont déroulés dans la réalité précédente, le temps se rectifiera de lui-même. Cette notion est bien entendu familière, puisqu'elle avait déjà été énoncée par Harvey dans Different Destinations.
Cet épisode donne aussi l'opportunité à Kemper - auteur de l'épisode - de créer une réalité non réalisée complètement loufoque dans laquelle les personnages sont dans la peau des autres. Ce n'est d'ailleurs pas totalement innocent : Sikozu/Stark se révèle être la clé pour trouver Katratzi, une base militaire où l'Empereur des Scarrans a ses quartiers.
Ces derniers sont plus que jamais intéressés par les connaissances de John, et sont prêts à tout pour s'en emparer avec comme but ultime le contrôle de l'univers. Ils profitent alors d'une rencontre fortuite avec l'équipage de Moya lors de négociations secrètes entre Grayza - toujours décidée elle aussi à mettre la main sur l'astronaute - et la ministre Ahkna pour capturer Aeryn et lui soutirer des informations, notamment pour savoir si John est bien le père biologique de son foetus fécondé.
C'est à partir de ce moment que les priorités de Crichton se font réellement jour : à ses yeux, sauver l'univers n'est rien comparé à l'idée de la perdre, raison pour laquelle il propose un marché à Scorpius pour lancer une opération de sauvetage.
Cet arc débouche sur une révélation à propos de Sikozu : génétiquement modifiée par la résistance Kalishe afin de produire des rayonnements radioactifs fatals pour les Scarrans, elle est en fait une bioloide. Cela ne vient pas de nulle part, car certains indices ont été disséminés ça et là : Taalika n'absorbe pas son énergie dans Twice Shy, elle ne veut pas passer aux rayons X dans Terra Firma...
Elle lève le voile sur le mystère l'entourant dans un champ de Crysthérium (une plante que mangent les Scarrans et qui leur apporte leurs capacités intellectuelles). Le téléspectateur se prend alors une nouvelle claque : ces fleurs sont la raison de la torture infligée par Scorpius à Stark, car ce dernier vivait auparavant à Katratzi. Ce qui explique que Sikozu/Stark connaissaient également l'emplacement de la base.
Cette volonté de ne rien laisser au hasard est présente à tous les niveaux. Après être enfin retourné sur Terre - dans deux timelines différentes, ce qui lui a donné l'occasion d'appliquer la théorie d'Einstein et Harvey pour les corriger -, John comprend qu'il n'y a plus vraiment sa place à cause de ce qu'il a vécu et du danger encouru par sa planète. Il est également définitivement convaincu que les humains ne sont pas prêts à accueillir des aliens, et encore moins à se défendre contre eux. C'est le sujet central de A Constellation of Doubt.
Sous la forme d'un reportage réutilisant les vidéos tournées par le neveu de Crichton lors du séjour de ses compagnons sur Terre, l'épisode reprend dans les grandes largeurs les thèmes abordés dans A Human Reaction, en mettant en avant l'introspection à laquelle l'humanité devrait se livrer.
C'est ce qui va pousser Crichton à détruire le vortex menant à sa planète avant que les Scarrans ne puissent l'annihiler (cette manoeuvre est périlleuse, et il demande pour cela l'aide de Pilot que l'on voit exceptionnellement hors de Moya), en laissant derrière lui sa famille et une chance de les revoir. La scène d'adieu avec son père au téléphone, quand il est sur la Lune, est d'ailleurs très émouvante.
Force est de constater que cette dernière partie de saison est très dense, et la façon dont les pièces du puzzle s'emboîtent naturellement montre que cette saison était très bien planifiée. Vu qu'elle a été écrite dans l'optique d'une saison 5, ce n'est pas surprenant, et il y a par conséquent une énorme frustration lors du cliffangher final. Certains éléments restent inexpliqués, comme le fait que les Eidolons, les Sébacéens et les Humains soient liés d'une certaine manière, comme cela est suggéré dans What Was Lost.
Ce diptyque est celui qui voit Jool se séparer de ses amis en restant sur Arnessk, puisque le fait de réactiver les sondes de Darnaz a libéré les Eidolons d'une stase qui a duré 12000 cycles. C'est aussi la première fois que sa capacité à faire fondre le métal en criant est utilisée à bon escient, dans une scène jouissive où elle est entourée de Chiana et de Sikozu pour se battre; et qui rappelle le côté sexy que le show possède depuis le début (que la présence de Grayza et son décolleté plus que plongeant n'infirme en rien). Les scénaristes en ont conscience et ont toujours joué dessus, surtout dans cette saison 4 où la libido de la Nébari est plus que jamais mise en avant (au détriment de son don de prescience).
Concernant les autres personnages, Rygel reste fidèle à lui-même et sert souvent de ressort comique, tout comme Noranti qui passe son temps à faire des potions bizarres. Il faut croire que Moya attire les fous car elle est souvent à côté de la plaque, mais dans ses moments de lucidité elle sait apporter sa contribution. Elle cuisine, elle guérit, et ses herbes peuvent parfois se montrer utiles même si elle a la fâcheuse tendance à les utiliser sans prévenir.
Elle est à l'origine de ce que prend Crichton pour oublier ses sentiments envers Aeryn pendant une bonne partie de la saison, car leur relation est bien compliquée lors de son retour sur Moya avec Scorpius. Évidemment, cela ne sert qu'à retarder l'échéance avant qu'ils ne se remettent ensemble.
C'est également avec un certain plaisir que l'on assiste en fin de saison au rapprochement entre Chiana et D'Argo, qui est enfin libéré d'un poids depuis qu'il a rencontré Macton dans Mental As Anything et qu'il a enfin pu assouvir sa vengeance d'une manière bien plus perverse qu'en le tuant simplement. Cela ne fut pas sans heurts, ayant à un moment douté de son innocence car il aurait très bien pu tuer Lo'Laan dans un accès d'hyper rage.
Un seul regret le concernant : son capitanat à bord de Moya n'a pas de réel impact sur le fonctionnement de l'équipage, ce qui enlève du poids à ce qui était pourtant une bonne idée pour montrer qu'il a gagné le respect de ses compagnons d'infortune.
Malgré un départ assez lent, une fois que les événements s'accélèrent on retrouve le rythme et les idées de folie de la saison 3, avec des enjeux bien plus importants qui sont bien amenés et bien exploités. La continuité thématique et le toutéliage mythologique sont impeccables, et on a encore le droit à quelques moments épiques.
Les personnages ont tous connu une évolution cohérente dans l'ensemble, et leur solidarité acquise de haute lutte dans l'adversité fait plaisir à voir. Si ce n'est pas la totale réussite de la saison précédente, ça s'en rapproche sur bien des points, et l'investissement du téléspectateur est récompensé.
(bilan saison 1, 2, et 3 par Sygbab ; bilan saison 4, et PK Wars, publiés dans ces pages par Lurdo en 2012)
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