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LES TÉLÉPHAGES ANONYMES

Il était une fois Lurdo & Sygbab, deux internautes passionnés de séries tv et de cinéma, et qui cherchaient un endroit où archiver leurs avis (semi) éclairés...

Halloween Oktorrorfest 2016 - 113 - Stranger Things, saison 1 (2016)

Publié le 30 Octobre 2016 par Lurdo in Critiques éclair, Cinéma, Oktorrorfest, Télévision, Review, Halloween, Fantastique, Horreur, Netflix

Halloween approche à grands pas, et comme tous les ans, c'est l'heure de l'Oktorrorfest sur le blog des Téléphages Anonymes, avec au programme un marathon de cinéma fantastique et d'horreur pendant un peu moins de deux mois, de mi-Septembre à début Novembre...

Stranger Things, saison 1 (2016) :

En novembre 1983, le jeune Will Byers (Noah Schnapp), 12 ans, disparaît de la petite ville de Hawkins, dans l'Indiana. Joyce (Winona Ryder), sa mère, tente désespérément de le retrouver, tout comme Jim Hopper (David Harbour), le chef de la police locale. Mais c'est Dustin (Gaten Matarazzo), Mike (Finn Wolfhard) et Lucas (Caleb McLaughlin) trois amis de Will, qui ont le plus de succès dans leur enquête, puisqu'ils croisent le chemin d'Eleven (Millie Bobby Brown), une adolescente aux pouvoirs étranges, et qu'ils sont confrontés aux manigances d'une agence gouvernementale aux motivations sinistres, et à la menace d'une force surnaturelle particulièrement monstrueuse...

Régulièrement, le web et ses médias s'emballent pour une nouvelle série du câble américain, qui devient instantanément culte, quelle que soit son niveau qualitatif réel (et ses problèmes inévitables de format et de rythme, cf toutes les séries Marvel).

En parallèle, le web est désormais peuplé des enfants des années 80, qui érigent la nostalgie de leur enfance comme une valeur dominante (exactement ce dont les 'Member Berries de la dernière saison de South Park sont l'incarnation), et des enfants des générations suivantes, qui ne connaissent cette époque qu'au travers des films des années 80, et en ont une vision assez idéalisée et fantasmée.

Donc forcément, quand arrive Stranger Things, une mini-série Netflix se déroulant dans les années 80, et jouant massivement la carte du fanservice et de la nostalgie des films et romans fantastiques de cette époque, le show devient inévitablement "la meilleure série de l'année/de la décennie/du monde" !

*soupir*

Dans les faits, cependant, il en va autrement.

Car si Stranger Things s'avère une madeleine de Proust totalement comestible et même assez bien menée, formellement parlant, cette première saison est très loin d'être sans défaut, et peine un peu à exister au delà de son statut d'hommage-recyclage. Il n'y a en effet rien de vraiment original ou novateur dans ce gros mélange d'influences plus ou moins digérées, mais totalement assumées : ça reprend allègrement les schémas narratifs, les idées, les codes visuels et scénaristiques et autres archétypes d'innombrables oeuvres de genre, de Stephen King à Steven Spielberg, en passant par les Goonies ou, plus surprenant, Silent Hill et Under The Skin (on pense aussi très fort à Super 8, l'hommage bancal de JJ Abrams au cinéma Amblin). Le résultat, s'il brosse le spectateur dans le sens du poil en jouant à fond la carte du fanservice, manque malheureusement un peu de personnalité, puisqu'on passe son temps à se dire "tiens, ça, c'est inspiré de XXX, ou de YYY"

Un problème exacerbé par le format inhérent aux séries Netflix, toujours trop longues pour leur propre bien. Car si, sur le papier, les 8 épisodes de 50+ minutes de Stranger Things semblent un juste compromis entre les saisons trop longues des autres séries Netflix, et le format ultra-court de certains shows anglais, dans les faits, il ne fait que renforcer (de manière involontaire) la parenté de cette série avec les oeuvres de Stephen King : comme toutes les adaptations télévisées de ces dernières, Stranger Things raconte ainsi en 7-8 heures ce qui aurait pu être raconté en moitié moins de temps, de manière plus efficace et plus dynamique.

Cette série passe en effet énormément de temps à mettre en place des intrigues et des personnages secondaires qui, en fin de compte, n'ont qu'une fonction accessoire au récit, et finissent passés à la trappe plus ou moins rapidement. Du remplissage qui ne choque pas forcément sur le moment, mais qui, avec du recul, devient un peu voyant, et laisse énormément de temps au spectateur pour réfléchir un peu à l'intérêt de ce qu'il voit à l'écran.

Néanmoins, la série possède quelques points forts qui font son intérêt, au nombre desquels la reconstitution d'une époque plus ou moins fantasmée (ce n'est pas du 100% fidèle à la réalité, mais c'est homogène et crédible), son atmosphère très particulière (le score ambiant façon Tangerine Dream/Carpenter est plutôt sympathique, bien que pas forcément pertinent compte tenu du coeur du récit, qui singe plutôt les films Amblin) et sa distribution enfantine, très convaincante (Eleven est toute en retenue et en sensibilité, les autres enfants se débrouillent très bien, malgré des dialogues parfois pas assez réalistes et trop "écrits") ; comme ces enfants sont le coeur du récit, et le fil rouge de ces huit épisodes, c'est une grosse qualité de Stranger Things d'avoir su choisir des têtes d'affiche convaincantes, et qui donnent l'impression d'être vraiment amis (le petit Lucas excepté, qui passe son temps à s'opposer à ses potes et à protester, mais bon, c'est un problème d'écriture).

On ne peut pas en dire autant du reste des personnages, qu'ils soient adultes ou adolescents.

Les adolescents ne jouent pas forcément mal, mais n'ont au final qu'une importance minime dans cette saison, importance totalement disproportionnée par rapport au temps d'antenne qui leur est réservé ; au niveau des adultes, on est dans les traits très forcés - le shérif torturé (avec flashbacks lourds à la clef), le méchant très méchant, la mère hystérique et paniquée (épuisante Winona Ryder, qui ne semble plus avoir qu'un seul réglage de jeu : toujours à fond) - et en fin de compte, on ne s'attache à aucun de ces protagonistes. Ce qui pose forcément un petit problème, vu qu'ils composent facilement plus de la moitié du show.

Reste enfin l'approche technique. L'écriture est inégale, je l'ai mentionnée : elle manque de subtilité, elle manque de profondeur, les thématiques sont assez inexistantes, le dernier épisode donne lieu à une résolution prévisible, facile et frustrante, et le tout repose beaucoup trop sur son aspect fanservice pour convaincre totalement ; la réalisation, cependant, et les visuels utilisés durant ces huit heures sont très réussis. Il y a ainsi une certaine économie de moyens et d'effets lorsque le script l'exige, qui évite les débordements, et les effets numériques sont limités à quelques scènes, ainsi qu'au monstre de service, pas très inspiré, mais qui passe encore relativement bien à l'écran.

Au final, cette saison 1 a clairement été survendue par les critiques et le web, envoûtés, comme à leur habitude, par la carte de la nostalgie abattue par le programme ; mais Stranger Things n'est pas pour autant un échec.

Et cela, non seulement la série le doit à ses jeunes héros sympathiques, mais aussi et surtout à quelque chose de plus en plus rare aujourd'hui : une sincérité absolue dans ses efforts, une affection très claire pour ses personnages, pour leur univers, et pour toutes les références utilisées, et une absence totale du détachement cynique actuel qui a tendance à accompagner ce genre de nostalgie.

Stranger Things a beau être ultra-maladroit et dérivatif, mais au moins c'est sincère.

3.75/6

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